Le manifeste d’Audrey Ouazan présente l’essence d’un nouveau mouvement : le destructuralisme libérateur.
Comme le dit si bien le titre de son ouvrage, « enfin » ! Oui, il fallait oser proposer la création, l’union d’un nouveau mouvement littéraire et artistique, surtout de nos jours. Dans le paysage culturel, il semble que les œuvres se suivent et se ressemblent. Très lisses et sans prise de risque, les productions obéissent à des schémas et des codes partagés par de nombreux artistes. Malheureusement, cette technique portée aux nues peut aussi être à l’origine d’un sentiment étouffant. Est-ce que le créateur doit forcément se plier à des règles établies ? Et si la clef de l’épanouissement artistique était tout simplement d’écouter son instinct ? Dans ce livre publié aux éditions Baudelaire, le lecteur découvre tout un projet aux genres différents. Un savant mélange qui prône l’ouverture et la suppression des frontières entre les arts. Auteure mais aussi bâtisseuse d’un mouvement, Audrey Ouazan présente tous les enjeux de sa nouvelle « école » unique, où les peintres, écrivains, poètes sont poussés à révéler leurs pulsions. Ainsi, les codes et normes sont écartés, afin de laisser libre cours à l’imagination. Pour cela, Madame Ouazan va plus loin. En effet, cette ancienne juriste a également fondé deux initiatives, dont le projet sociétal Cursus Honorum, des structures qui ont pour but de former et enseigner cette méthodologie inédite, qui se concentre sur le fond — plus que sur la forme.
Le manifeste Le Destructuralisme Libérateur, enfin un nouveau mouvement littéraire et artistique pour tous ! d’Audrey Ouazan explique pas à pas les grands axes d’une pensée qui fuse.
Mais cela ne signifie pas pour autant que son auteure n’est pas rationnelle et organisée. En réalité, c’est l’opposé. Créer un mouvement littéraire et artistique demande une réelle cohérence. Même le manuel est une œuvre d’art à part entière, car il mélange les discours. Aussi informatif qu’éloquent, cet ouvrage incarne une certaine beauté, dans la spontanéité. Par exemple, le terme « premier jet » correspond à une ébauche, un ensemble d’idées qui jaillit de l’esprit, au moment où l’inspiration habite l’artiste. Audrey Ouazan met le doigt sur l’importance de cet éclat, de cette forme de sincérité. Dans ces instants de création pure, l’âme laisse dévoiler toute sa sensibilité. Dans la fougue, l’impulsivité, le résultat ne respecte pas forcément les codes habituels. Et c’est précisément ce que recherche Audrey Ouazan à travers son propre mouvement.
Le manifeste ouvre des pistes à l’artiste qui souhaite prendre de la distance avec l’expression conventionnelle de l’Art. En réalité, les anticonformistes se sentiront concernés par ce souci de « l’unique » et ce défi sous-jacent. Le challenge, derrière ce destructuralisme est de créer, en puisant dans le néant. Cela peut sembler très complexe, car les artistes sont formés par des écoles très techniques et des mouvements anciens, qui préexistent depuis des siècles. S’il y a bien un type de discipline qui s’oppose fermement aux idées d’Audrey Ouazan, il s’agit sans doute des Beaux-Arts. Cette tradition conservatrice académique fondée en Europe inclut la peinture, la sculpture, le dessin, la danse, etc. Pour mener à bien ces œuvres d’art et leur donner une forme bien distincte, il est important de suivre une méthodologie. Par exemple, dans le monde de la musique, une note est juste ou fausse. Il n’existe pas de demi-mesure. À la manière d’une science exacte, ces formes d’expression laissent en théorie — peu de place à l’imagination…
Pour construire, il faut parfois détruire des fondations vieillissantes. En ce sens, Audrey Ouazan attire l’attention sur un point crucial. Ce ne sont pas les systèmes eux-mêmes qui forment le problème, mais plutôt l’esprit — qui ne se focalise pas suffisamment sur la magie de l’inspiration. Le pouvoir de création et d’invention est une compétence humaine fascinante, qui suscite bien des convoitises. Le concept proposé par Madame Ouazan invoque un besoin de se réunir, pour les artistes. Qu’il s’agisse de littérature ou toute autre forme d’expression, chacun peut rejoindre le destructuralisme. Au sein de ce collectif, tout le monde peut s’interroger, remettre en cause ses acquis pour présenter de nouvelles méthodes de production uniques. Parmi ces procédés, l’écriture spontanée est fortement valorisée. En quoi est-ce que cela consiste ? Ce type de rédaction libère totalement les compétences créatrices de chacun, chacune. Ainsi, l’esprit de l’artiste est exempté des contraintes habituelles. Ici, il n’est pas question de s’attarder sur la grammaire ou l’orthographe, mais plutôt sur le résultat et les effets sur l’imagination ouverte.
Audrey Ouazan est la fondatrice d’un mouvement résolument moderne, qui favorise un accès à l’Art pour tous. Cette perte de contrôle peut être très saine pour l’artiste. En effet, le stress et l’angoisse sont souvent des émotions connues de celles et ceux qui se lancent dans des projets artistiques. Peur du jugement, de ne pas correspondre aux techniques… En dehors de cette rationalité, la poésie et le lyrisme en sont renforcés. Grâce au pouvoir de l’imagination, l’écriture prend une forme unique, déstabilisante mais toute nouvelle… Avec une telle façon de penser autrement, l’éveil des consciences est plus que jamais d’actualité.
Le destructuralisme va de l’avant. Ce n’est pas seulement un projet qui concerne la sphère de l’Art mais bien la société entière. Grâce à cette soif d’air frais, de sang neuf, sa fondatrice entend étendre cette démarche exclusive au plus grand nombre. C’est pourquoi le résultat du manifeste n’apparaît pas dans une catégorie spécifique de la ligne éditoriale des éditions Baudelaire, réputées pour leur éclectisme. Dans cette déclaration d’amour à la liberté et au génie créatif, Audrey Ouazan souhaite réunir, unifier sous un objectif : proposer des contenus différents et surtout puissants. Même s’il est agréable de passer un instant de détente avec un livre « facile d’accès », qui répond précisément aux attentes des lecteurs, l’artiste engagé cherche à bousculer. Ses résultats ne sont pas toujours plaisants. Elles ont pour ambition d’aller au-delà, de creuser dans l’inconscient de sa cible. Un idéalisme aux nombreuses thématiques, qui ne manquera pas de toucher les artistes — qui se sentent souvent mis à l’écart dans un système valorisant le succès d’un produit plutôt que son intention.
« Il est grand temps de rallumer les étoiles » : que le jour se lève sur une France en panne d’inspiration, un message engagé qui prône les bienfaits de l’imagination…
Zack SEMINET
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